Mgr Gérard Daucourt

Évêque de Nanterre

 

La raréfaction des vocations presbytérales est un drame pour l'Église et sa mission dans plusieurs pays, dont le nôtre. Par la prière, la réflexion et de nombreuses initiatives, tous les diocèses s'efforcent d'être en état d'alerte et de disponibilité pour favoriser l'éclosion, l'accueil et l'accompagnement de vocations au ministère de prêtre.

 

Des solutions, parfois contradictoires, sont prônées pour remédier à une crise dont certains croient pouvoir même désigner les responsables, les coupables. Un nouvel accusé est maintenant cité : le diaconat ! Il aurait « peut-être même participé à l'éclosion des vocations... par leur présence massive dans les paroisses, c'est l'image même du sacerdoce qu'ils [les diacres] 'contribuent à brouiller » (Le Figaro ; hors série sur Benoît XVI).

 

Que la réalité du diaconat ne soit pas encore claire dans l'esprit de beaucoup est une évidence. Nous savons qu'un grand nombre de catholiques très en distance de la vie ecclésiale pensent que les diacres pourraient remplacer les prêtres.

 

On repère aussi à travers le monde une grande diversité dans la mise en œuvre de la restauration du diaconat par les épiscopats. Des divergences ont caractérisé le ministère diaconat au cours des siècles et certaines animent encore aujourd'hui le débat qu'il suscite, comme l'a reconnu la Commission théologique internationale dans son important document sur l'évolution et les perspectives du diaconat (1 ).

 

Je passe sur le fait que l'on puisse prétendre qu'un ministère fait du tort à un autre, alors que la Parole de Dieu affirme qu'il y a * diversité de ministères, mais que c'est le même Dieu qui opère tout en tous » (I Cor. 12, 4). Je ne veux pas non plus ici présenter le diaconat De nombreux documents sont à notre disposition. Il faut les faire connaître, continuer d'expliquer le diaconat, et surtout montrer ce que sont et ce que font les diacres. Dans leur famille, leur profession, leurs communautés, la société - pour la mission ! - ce qu'ils sont et ce qu'ils font participe à la complémentarité et à la diversité par laquelle le Saint-Esprit manifeste l'Église comme communion et précise sa signification de sacrement universel du Salut. Le ministère des diacres est sacramentel.

 

En dehors d'une vision de foi conforme à la Tradition et à l'enseignement de l'Église catholique, toute discussion sur le diaconat aboutit à une impasse et on tourne en rond à propos de ce que les diacres peuvent ou ne peuvent pas faire. On en reste au niveau fonctionnel et on s'empresse de montrer qu'il n'est pas nécessaire d'être ordonné diacre pour accomplir les mêmes services qu'un laïc.

 

Il est vrai que, quelquefois, des diacres peinent à se situer comme diacres, et eux-mêmes risquent ainsi de fausser une juste compréhension de la spécificité de leur ministère. Mais n'y a-t-il pas aussi parfois des laïcs qui semblent se prendre pour des prêtres et des prêtres pour des laïcs ? «

 

Des erreurs, des insuffisances ne peuvent justifier une méfiance, voire une opposition à l'égard du don fait à l'Église et au monde par le Saint-Esprit lorsque les Pères du deuxième Concile du Vatican ont décidé de restaurer le diaconat. Ne laissons pas se répandre dans l'opinion catholique que le diaconat serait plus une difficulté qu'une grâce et un défi.

 

La question de fond ne serait-elle pas, une fois de plus, celle de la réception du Concile ? Certes, il n'oblige aucun épiscopat à restaurer le diaconat. Cependant, si le Concile a rendu à nouveau possible ce ministère, s'il en a précisé le sens et la fonction, s'il a affirmé que * pour l'implantation de l'Église et le développement des communautés », il est aussi nécessaire que le ministère des prêtres et des catéchistes (Ad gentes 15), on ne peut laisser courir l'idée que le diaconat n'est pas important ou qu'il est dangereux pour d'autres ministères. Voici donc encore un domaine à propos duquel le Concile s'est clairement prononcé, mais que certains courants rampants veulent ignorer ou contester.

 

Les décisions et orientations conciliaires deviendraient facultatives. Les situations ou pratiques d'avant le deuxième concile du Vatican seraient équivalentes à celles que le Concile a instaurées ou réformées en les enrichissant. Dans sa réception, ce Concile continue de déranger. Ne nous étonnons pas que les diacres dérangent aussi. Des déviations et des erreurs dans l'application du Concile existent. On ne peut en tirer argument pour ignorer ou faire semblant d'ignorer les orientations ou décisions conciliaires. Les évêques s'efforcent d'aider à une application toujours plus fidèle du Concile, mais ils ne peuvent accepter que l'on « jette le bébé avec l'eau du bain » sous prétexte que parfois l'eau est sale.

 

Le Concile est « la grande grâce dont l'Église a bénéficié au XXe siècle. Il nous offre une boussole fiable ». (Jean-Paul II) «r Je veux affirmer avec force ma très ferme volonté de poursuivre la tâche de la mise en œuvre du Concile Vatican II. » (Benoît XVI) Merci au Concile pour les diacres d'aujourd'hui et de demain.

 

La Croix 4/07/05

 

 

 

 

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